Pris en flag' ...

Pris en flag' ...

Je ne suivrais plus les conseils de ma soeur. Quelle diablerie ! Sous ses conseils, j'ai capturé un nifleur pour qu'il m'aide à chercher de quoi me faire un petit argent de poche. Ce maudit rongeur a tiré si fort sur la laisse que je lui ai attaché qu'il m'en a déboîté l'épaule ! J'ai pourtant l'habitude de promener le sharpei de Hyun-su... Mais là c'est une bestiole pas plus gros qu'un chaton qui arrive à m'arracher le bras en trois secondes de temps. J'ai sous-estimé la force de cette bête. Je l'ai donc laissé filer, c'était mieux que de le laisser tirer sur mon bras comme un malade, et tant pis pour mon argent potentiel.

Voilà la raison pour laquelle je suis en train de monter les escaliers de l'académie, agonisant et au bord des larmes. Oui, ça m'arrive des fois, d'avoir les larmes aux yeux. Pas parce qu'on est un dur qu'on peut pas avoir mal - heureusement, sinon ça serait vraiment effrayant. Je croise quelques élèves qui me regardent avec plus ou moins d'insistance. Quoi, j'ai pas le droit d'être blessé ? Je finis par arriver à l'infirmerie, à peu près entier et sans trop de remarques. L'infirmière me regarde de la tête aux pieds, perplexe.

- Ju Yeong ? Encore toi ?

J'acquiesse. Faut dire que je passe pas mal de temps ici, à chaque fois que je me lance dans une nouvelle aventure ça se termine avec un plâtre ou un bandage. Je lui explique alors ce qu'il s'est passé, ce qui a le don de la faire rire. Je lui offre alors mon plus large sourire, rougissant légèrement lorsque sa jolie paire de fesses me fait face, sa tête étant plongée dans les tiroirs de son bureau. Elle en sorti une bouteille de ce qui semblait être du lait. Les yeux ronds, je m'étonnais de son choix.

- Euh... Anh-Gyu, je doute que ce soit l'heure du thé...
- Une chose en son temps ! J'ai un premier patient à servir.

Elle passa la tête entre les rideaux d'un lit, et donna le lait à un élève qui y était couché. Elle me demanda ensuite de lui tourner le dos, et elle s'approcha de moi pour me tirer un grand coup sec sur le bras. Je crois que je n'ai jamais poussé un tel hurlement de toute ma vie. Même sous la torture. Sa main vient alors se plaquer sur ma bouche, et avec un peu plus de douceur, elle me remet l'épaule en place. Cette fois, je ne cries pas. Je m'assied ensuite sur un lit vide, essouflé.

- Merci Anh-Gyu.

Elle me pose un doigt sur les lèvres, et me regarde dans les yeux. Je suis mal à l'aise, en fait. Si j'échoue souvent ici c'est pas seulement parce que je suis un casse-cou, car y a certains problèmes que je pourrais régler moi-même, mais c'est aussi parce que j'aime bien passer du temps avec Madame Park. Enfin, Anh-Gyu. C'est vrai : à peine la vingtaine, jolie, sexy, sympa... Elle a tout pour plaire. Mais parfois elle m'intimide. Comme c'est le cas, là. Elle se penche sur moi, s'agenouille pour être à ma hauteur, et m'embrasse avant même que je ne comprenne ce qu'il m'arrive. Surpris, je m'agrippe au matelas, avant de fermer les yeux et répondre à son baiser. On ne devrait pas. Elle pourrait avoir des ennuis. Elle passe une main dans mes cheveux, tandis que, transit par la surprise, je ne bouge rien d'autre que ma langue. C'est alors qu'un bruit de rideau se fait entendre.

- Euh...

Anh-Gyu s'interrompt immédiatement, lève les yeux, et court hors de la pièce, sous prétexte d'avoir un rendez-vous avec Suwa. Je la regarde s'éloigner, caressant mes lèvres du bout des doigts, pensif. Puis je me retourne pour voir celui qui a fait fuir Anh-Gyu. Un garçon au style un peu bon-garçon, les cheveux mi-longs et le visage un peu blafard me regarde, les yeux ronds, apparemment tétanisé par l’évènement. Je me lève d'un bon, rougissant.

- C'est pas ce que tu crois ! Dis rien à Suwa, faut pas lui attirer d'ennuis !

Je suis dans ma chambre, en train de me reposer. J'en ai bien besoin, même si je suis sorti de l'hôpital, je ne suis pas encore prêt à reprendre les cours. La sonnerie retentit, c'est donc le moment d'aller au réfectoire pour aller manger avec les autres. Je sors donc de ma chambre, en slalomant entre les élèves comme d'habitude. Je marche vers la cantine quand ma vue se brouille, je sens une pression sur mon ventre et je tombe au sol, malgré mon traitement au lait de licorne... Je ne vois rien, le Néant, des choses se bousculent dans mon esprit, mais elles restent non-identifiées.

Soudain, je rouvre les yeux, et devant moi, l'infirmière en train de me préparer un verre de lait de licorne. Mais quelqu'un d'autre rentre. L'infirmière m'apporte mon lait de licorne. Et je les entends parler, je ne comprends pas ce qu'elle lui dit, mais je suis du genre curieux, j'ouvre donc le rideau qui tombe entre eux et moi. Et ce que je vois, un élève en train d'embrasser l'infirmière agenouillée devant lui.

-Euh...

L'infirmière s'enfuit en courant en baragouinant qu'elle a un rendez-vous important avec le directeur. Si c'est le même genre de rendez-vous qu'avec Ju Yeong, je demande à voir ça.

- C'est pas ce que tu crois ! Dis rien à Suwa, faut pas lui attirer d'ennuis !

- T'en fais pas, je ne dirai rien à Suwa.

J'ai une idée qui me vient à la tête. Mon frère est bien redacteur du journal scolaire non ? En plus il ma demandé si j'avais pas une idée d'article.

- Voilà qui est parfait pour lui.

- T'en fais pas, je ne dirai rien à Suwa. Voilà qui est parfait pour lui.

C'est moi, ou ce gars parle un langage codé ? A moins que je sois encore sous le choc du comportement d'Anh-Gyu et que j'aie donc mal entendu ? Je le regarde d'un air déconcerté.

- Hein ? Qu'est ce que tu m'baves ?

Je fais un peu tâche ici, avec mon faux-air de petit rebelle des poubelles, au milieu d'une infirmerie toute blanche et face à un type plus malade que vivant. Il y a d'autres lits, sûrement occupés pour la plupart, et moi je suis debout entre le lit sur lequel j'étais assis et la grande porte par laquelle est partie l'infirmière. Baskets aux pieds, les cheveux en pagaille, avec des vêtements trop grands pour moi et la voix qui avait pas encore mué, à prendre de haut un type qui doit bien avoir deux ou trois ans de plus que moi, à en juger par sa grosse voix et sa grande taille. En clair, j'ai juste l'air d'un petit minable qui cherche l'embrouille pour faire son dur-à-cuir. Et l'embrouille, je l'avais trouvé. Lorsque je me suis tourné pour le voir, j'ai tout de suite pensé que je l'avais déjà vu quelque part. En fait, il me semble bien que c'est le frère de Jae Hee, qui travaille avec moi au journal de l'Académie. Ils ne se ressemblent pas, du moins à peine, mais j'ai déjà vu une photo de lui sur le bureau de Jae Hee à la salle de rédac'. Je me jette sur le lit face à moi, en prenant quand même soin de pas mettre mes semelles sales sur les draps blancs, et le regarde en penchant la tête.

- Tu serais pas le frère de Jaehee toi par hasard ? J'te croyais mort vu le nombre de photos de toi qu'il expose sur son bureau. On dirait genre heum... Un autel en ton hommage on un truc comme ça.

J'enlève mes chaussures pour me mettre en tailleur, passant machinalement ma langue sur mes lèvres.

- Hein ? Qu'est ce que tu m'baves ?

Mince, je crois que j'ai pensé tout haut... Il a dû rien comprendre le pauvre. Il se jette dans un lit qui est censé accueillir un élève malade. Ce qui ne sert à rien bien sûr. Il se penche un peu pour me regarder et me dit :

- Tu serais pas le frère de Jaehee toi par hasard ? J'te croyais mort vu le nombre de photos de toi qu'il expose sur son bureau. On dirait genre heum... Un autel en ton hommage ou un truc comme ça.

Moi mort ? Ah bah d'accord. Et il a le droit d'avoir des photos de moi, je suis son frère après tout. Comment ça un autel ? Je sais que je suis un sorcier, mais de là à être un Dieu euh... c'est un peu exagéré quoi. Il retire ce qu'il ose appeler des chaussures et croise ses jambes pour se mettre en tailleur. Je relève la tête et le regarde avec un air étonné.

- Euh... Oui c'est bien moi. Qu'est ce que t'as dit ? Un autel ? Je savais qu'il m'appréciait, mais pas à ce point là ! Et malheureusement pour toi je ne suis pas encore mort, et c'est pas au programme désolé...

Je m'allonge sur mon lit et regarde le plafond.

- Euh... Oui c'est bien moi. Qu'est ce que t'as dit ? Un autel ? Je savais qu'il m'appréciait, mais pas à ce point là ! Et malheureusement pour toi je ne suis pas encore mort, et c'est pas au programme désolé...

Euh... Ouais bon, il est bizarre. Il a pas l'air de comprendre le sens du mot "hyperbole", même si moi-même je suis étonné de retenir un mot aussi compliqué. Il s'allonge dans son lit, les yeux rivés au plafond, mais j'ai pas l'impression qu'il veuille que je m'en aille. De toute façon moi j'en ai pas envie, pas pour l'instant. Et puis, j'ai encore mal à l'épaule, il vaudrait mieux que je me repose une petite heure.

- Pourquoi elle t'a donné du lait de licorne ? C'est pas sensé être sacré ?

Je m'assied au bout de son lit pour mieux le voir. J'ai toujours été du genre sans-gêne. Je sors ma baguette pour faire apparaître deux canettes de bière venues tout droit du mini-frigo magique que j'ai caché dans ma chambre. Je lui en tends une, tout sourire.

- Tu veux pas plutôt une petite binouze ?